Fanta Touré: le pagne comme héritage

Date:

Jeudi, c’est le jour de marché à Danané, les commerçants affluents de tous les villages environnants. Après une forte pluie, les femmes, seules ou accompagnées de leurs enfants s’activent à placer leurs marchandises et interpeler les clients pour vendre au plus vite avant le coucher du soleil. 

Fanta Touré est l’une de ses nombreuses femmes ayant une boutique ou un étal au marché mais, elle a une particularité : c’est la présidente de l’association « belles dames » de Danané. Lorsqu’elle apprend que nous sommes de l’ONU Femmes, son visage s’illumine de joie et elle nous reçoit spontanément.

Fanta Touré, présidente des « belles dames » de Danané / © ONU Femmes Côte d’Ivoire

Sympathique, ambitieuse et intelligente, Fanta est commerçante depuis son enfance, elle a appris auprès de sa mère. Mais, lorsque la crise post-électorale éclate, sa famille se déplace de Bin-Houyé à Danané où elle y perd hélas son père et sa mère. Orpheline, et mère célibataire sans soutien, une lueur d’espoir naît lorsqu’à travers la Mairie de Danané, elle apprend qu’un financement des groupements de femmes allait avoir lieu.

En 2014, ONU Femmes rencontre Fanta Touré dans le cadre du projet de réintégration socioéconomique des femmes vulnérables de Danané cofinancé par l’UNHCR à hauteur de 192 000 $ et ONU Femmes avec 50 000 $, soit un financement global de 242 000 $ (plus de 140 millions FCFA). Cet appui conjoint visait à soutenir les organisations de femmes afin de promouvoir la cohésion sociale et la réintégration durable des femmes rapatriées du UNHCR par le biais du financement des activités génératrices de revenus. Dans la commune de Danané, 15 groupements de femmes dont « Les Belles Dames » ont reçu des financements.

Avec ce financement, Fanta décide alors de lancer un commerce de pagne qu’elle connaissait car sa mère pratiquait cette activité.

Marché de Danané / © ONU Femmes Côte d’Ivoire

Depuis, lors, elle s’est mise au travail pour que sa situation change. « Je ne suis pas allée à l’école mais je sais gagner de l’argent. Lorsque j’ai reçu les fonds, j’ai ouvert un compte bancaire. Les bénéfices du commerce de pagne ne sont pas énormes. « J’achète un pagne à 5000 FCFA et je le revends à 6000 FCFA. Par jour, je dépense 250 FCFA pour la nourriture et je peux économiser au moins 750 FCFA. Quel que soit le montant de mon bénéfice journalier, j’épargne une partie » explique-t-elle. Grâce à son commerce de pagnes, Fanta a un revenu mensuel minimum d’environ 22500 FCFA (38$).

En marge de leurs activités respectives, les « belles dames » ont aussi une tontine journalière de 500 FCFA qui s’élève à 15000 FCFA après les cotisations des 30 membres. Lorsque c’est son tour, Fanta utilise 10 000FCFA de son gain pour acheter deux nouveaux pagnes, dépense 2000 FCFA et épargne 3000F.

Par son activité et ses astuces, Fanta arrive à scolariser sa fille en classe de troisième et affirme avec fierté et gratitude que tout va bien : « grâce à ONU Femmes et au HCR, ma fille et moi mangeons bien, sommes en bonne santé et dormons bien !»

Aujourd’hui, elle rêve de voir son commerce s’agrandir et souhaite mieux contribuer à un avenir rassurant pour sa fille en lui permettant d’aller le plus loin possible dans les études.

Gérard Maffo , partenaire technique entre Fanta (à gauche) et Camara Sita (à droite), membres des belles dames / © ONU Femmes Côte d’Ivoire