RDC: Combler l’écart entre les sexes dans la recherche universitaire
Le 1er décembre 2023. Dans le cadre des 16 jours d'activisme, l'Ambassade de Belgique et ONU Femmes, en partenariat avec l'ARES et l'Université de Kinshasa, ont organisé un atelier sur les Principes d'Autonomisation des Femmes (WEPs) pour les chercheuses de l’Université de Kinshasa.
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«Quand quelqu'un parle d'ingénierie, de médecine ou de professeurs, on imagine un homme» - participante à l'atelier et doctorante en biologie. Le monde universitaire, notamment en ce qui concerne les matières STEM, reste un secteur fortement dominé par les hommes. L’Université de Kinshasa n’est pas étrangère à ces tendances ; sur les 1 328 membres du personnel académique, seuls 119 sont des femmes (9 %), tandis que seulement 15 % du personnel scientifique sont des femmes. De même, les femmes représentent 25 % du personnel en sciences appliquées et 23 % en sciences exactes. L’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes restent un principe fondamental des politiques de nombreux établissements universitaires. Alors pourquoi les femmes continuent-elles d’être sous-représentées dans les universités au 21e siècle ?
Les stéréotypes de genre, la pression sociétale, le manque de soutien, le personnel partiaux et la pression familiale, sont quelques des facteurs qui contribuent à la faible représentation des femmes dans les établissements universitaires, notamment dans le secteur STEM. Tandis que les hommes sont encouragés et félicités pour leur décision de poursuivre des études universitaires, les femmes sont interrogées sur leurs choix : Qu'en est-il du mariage ? Vous vieillissez, n'est-il pas temps d'avoir des enfants ? Votre mari est-il d'accord ? Comment allez-vous assumer la responsabilité de la maternité ? Mais n’est-ce pas un travail d’homme ?
En plus de concourir pour des postes de haut niveau, les femmes doivent lutter contre le jugement de la société et contre le manque de soutien et d’encouragement de la part de leurs pairs, en incluant des autres femmes et des membres de leur famille. Le bombardement constant de points de vue opposés et d’obstacles peut facilement ébranler la confiance en soi, conduisant de nombreuses femmes à subir la pression et à se conformer à la vie qui a été construite pour elles par une société axée sur les stéréotypes. « Il faut être déterminée pour réussir, sinon il est très facile de céder aux opinions des gens » a exprimé une chercheuse en sciences ; « On nous dit que le mariage passe en premier, qu’il faut choisir entre un homme et notre carrière », a partagé une professeure de chimie, l’une des quatre femmes professeures, dans une faculté de 54 personnes.
Les Principes d'autonomisation des femmes, une initiative de partenariat d'ONU Femmes et du Pacte mondial des Nations Unies (UNGC), sont un ensemble de considérations destinées à aider le secteur privé dans son ensemble à se concentrer sur les éléments clés nécessaires pour promouvoir l'égalité des sexes sur le lieu de travail, sur le marché et au sein de la communauté. Il fait référence à 7 principes clés qui peuvent contribuer à une véritable intégration des femmes et du genre dans chaque département et niveau d'une organisation, à savoir : i) La gestion de l'organisation est favorable à la notion d'égalité des genres, ii) L'égalité entre les hommes et les femmes dans la collaboration. , iii) Santé et sécurité du personnel, iv) Éducation et formation, v) Développement de stratégies de marketing pour mettre en valeur le rôle des femmes dans les STEM, vi) Égalité par le plaidoyer et la mobilisation communautaire, vii) Mesurer les progrès.
L’intégration de ces principes ne profite pas seulement aux femmes de l’institution, mais contribuera au développement de l’ensemble de l’organisation, car l’égalité des sexes n’est pas exclusivement l’affaire des femmes, mais profite à tout le monde. « ONU Femmes, à travers le pilier WEE, est particulièrement intéressé à disséminer les WEPs auprès des femmes professeures et scientifiques pour favoriser l’enracinement d’une culture du genre au sein des institutions à caractère scientifique comme l’université et pour corriger le déséquilibre dans la représentation des femmes dans les filières scientifiques. » a partagé Rosnert Ludovic Alissoutin, chef du programme d’autonomisation économique des femmes à ONU Femmes RDC.
L’encouragement des femmes au sein du monde universitaire peut commencer par le soutien d’autres femmes, mais sa réussite nécessite le soutien des hommes et des institutions. Un nombre croissant de comités et de clubs dans les universités se consacrent à la présence des femmes dans les sphères académiques ; les universités incluent l’importance de l’égalité des sexes dans leurs chartes et politiques. Néanmoins, cela ne suffit pas. Mentionner l’importance de la représentation des femmes dans une institution ne garantit pas que les systèmes et mécanismes soient actualisés et adaptés au besoin d’égalité.
Les équipes de recrutement doivent s'efforcer activement d'abandonner les stéréotypes de genre et le langage biaisé lorsqu'ils font référence aux candidates féminines, les hommes scientifiques doivent traiter leurs pairs femmes sur un pied d'égalité et se désengager des commentaires sexistes et des comportements dénigrants, les universités doivent mener des études internes pour comprendre où elles se situent en termes d'égalité des sexes. Ce n’est que grâce à l’engagement des hommes, des femmes et de tous les partis décisionnels que les femmes pourront être intégrées avec succès et sur un pied d’égalité dans les sphères universitaires actuellement dominées par les hommes. « Il doit y avoir une meilleure synergie entre les professeurs, le personnel et les étudiants, afin d’établir des programmes et des projets de mentorat destinés aux femmes » a exprimé une étudiante de deuxième année.
Voici quelques mesures à prendre au niveau institutionnel, proposées par les WEPs :
- Utiliser l'outil d'analyse de l'écart entre les sexes au sein de l'organisation pour mieux comprendre la position de l'institution et les prochaines étapes à suivre.
- Élaborer un plan d'action pour mieux intégrer l'égalité femmes-hommes à tous les niveaux de l'institution
- Créer un cadre de développement de rapports, pour garantir que les progrès sont mesurables et peuvent être évalués. Cela permet d’identifier de nouveaux défis et obstacles et facilite la création de solutions.
Les 20 femmes chercheuses de l'Université de Kinshasa qui ont participé à cette formation, travaillent dans les secteurs des sciences humaines, de la linguistique, des sciences naturelles et des sciences exactes, et plusieurs mènent leurs propres coalition académiques et professionnelles. Ils ont tous exprimé la nécessité d’une meilleure égalité des sexes et d’une meilleure intégration dans leurs départements respectifs. « Nous devons postuler aux bourses locales, encourager les femmes à postuler, parler de l’importance des femmes dans le monde universitaire » a mentionné une chercheuse; « Les anciens étudiants et les parties prenantes de l’université doivent également être impliqués ». Avec le bon plan d’action, une ambition partagée pour réaliser les WEPs et l’engagement de leurs institutions, la réalisation des principes d’autonomisation devient réalisable.
« Autonomiser les femmes, c'est leur fournir les outils nécessaires pour exercer un pouvoir et un contrôle sur leur propre vie. Nous souscrivons pleinement à la mission consistant à investir dans la promotion de l'égalité des genres et l'autonomisation des femmes, que ce soit sur le lieu de travail, au sein de leur communauté, et surtout, dans le domaine de l'enseignement » a exprimé Eric Willemaers, Ministre-Conseiller et Chef de la Coopération à l’Ambassade de Belgique à Kinshasa. ONU Femmes et l’Ambassade de Belgique sont engagées dans leur mission visant à parvenir à l’égalité des sexes et à l’autonomisation des femmes en RDC et dans le monde.